Poignard et rapière brandies, Amaelle regardait la jeune femme devant elle. Nulle réponse ne franchissait ses lèvres. Mais un sourire éclairait son visage, un sourire qui défaisait l'hostilité naturelle qu'Amaelle ressentait. Mais pour avoir été mis en présence des magiciens puissants qui paraissaient au premier abord totalement inoffensifs mais qui s'étaient révélés être extrèmement dangereux, Amaelle hésitait à baisser sa garde.

Bah... peu importe, décida-t'elle. Les armes n'avaient jamais empêché un magicien d'agir. Amaelle rangeât ses armes et répéta ses questions. Mais toujours pas de réponse. Aussi, se frappant la poitrine, elle déclina son identité : Je suis Amaelle Loubière de Jolimont. Et je ne sais pas pourquoi je suis ici. Toi non plus, n'est-ce pas ? Puis elle sourit, attendant un geste de la jeune femme.

A ses oreilles venaient de lointaines clameurs. Apparemment, la pièce en côtoyait d'autres et il y avait du monde dans la baraque. Ces gens habitaient-ils ici ? Débarquaient-ils eux aussi d'un ailleurs, ne sachant que faire ni comment découvrir ce qui leur était arrivé ? Les questions tournaient dans la tête d'Amaelle.

Les minutes s'égrenaient dans un silence total. Amaelle scrutait toujours le visage souriant de la jeune femme. Elle avait l'air aussi désemparée qu'elle-même, les bras le long du corps sans un mouvement. Tout à coup, comme dans un bruissement d'ailes, l'étrangère se mit à agiter les bras avec lenteur, les ouvrant largement, puis les refermant avec la grâce des oiseaux, ses longs doigts frémissant. Amaelle restait interdite devant cette danse qu'elle ne comprenait pas. Peut-être était-ce un langage... mais quoi comprendre. Jamais de sa vie, Amaelle n'avait été confrontée à un cas semblable. Elle observa les mouvements, essayant de décrypter un geste familier. Peine perdue.

Des bruits de pas venaient de derrière la porte, on marchait dans le couloir en s'apostrophant, en riant mais Amaelle craignait que celle-ci ne s'ouvre sur des ennuis. Ou simplement encore des inconnus avec lesquels elle serait incapable de communiquer.

Bien, il fallait agir. Mettant son orgueil de côté, Amaelle se lança dans un mime maladroit et pataud, espérant répondre de son mieux aux attentes de l'inconnue. Ridicule... elle se sentait totalement bête. D'autant plus que ça ne provoquait absolument rien. Ah... si, elle voyait bien que la jeune femme reproduisait à son tour ses mouvements sporadiques. Elle était si nulle que ça ! Mazette, un tel miroir n'était guère flatteur ! C'était à mourir de rire ! Où avait-elle donc atterri ?

Le rire monta en elle, éclata et se propagea jusqu'à l'inconnue qui cessa sa danse. Les deux jeunes femmes étaient maintenant hurlantes de rire et échangeaient des coups d'oeil complices. Elles se tenaient les côtes, impossible de réprimer cet élan de joie. enfin, leurs rires cessèrent et Amaelle remarqua que l'inconnue était nimbée d'un halo qu'elle semblait générer. En regardant mieux, Amaelle croyait discerner, dépassant de son dos, deux paires d'ailes... d'anges ?

Dégainant à nouveau son poignard flamboyant, Amaelle se rapprocha de la jeune femme. Deux hommes diaphanes se tenaient bien dans la lumière derrière elle. Elle avait sûrement décidé de les invoquer. Misère... Fallait vite quitter cette maudite pièce, sans quoi, à trois contre une, ça risquait d'être chaud.

Mais non, elle souriait toujours. Et les hommes aussi. L'un deux montra la tapisserie derrière Amaelle. Et une voix retentit dans sa tête : Nous sommes Katz et Ziee, les archanges. Nos vies sont liées à Thisbeth, celle qui voyage. Nous sommes venus te chercher car une mission nous attend dans un autre monde. Thisbeth n'est pas une guerrière et nous qui connaissons tous les Multivers, nous avons entendu parler de tes talents de mercenaires. Aussi, nous avons guidé vos pas jusqu'à cette rencontre.

Oh , merde, encore des aventures... décidément, à peine mes services loués, on me sollicite pour d'autres, pensa Amaelle.

On vous entend Amaelle dit la voix, dans sa tête, en riant Et sachez que ce temps ne vous ai point décompté sur l'aventure que vous poursuivez actuellement contre l'Orbe du Chaos.

Ben mince alors, on communique sans parler chez vous ? Alors, d'abord vous m'attirez ici à l'insu de mon plein gré, ensuite vous me confiez votre protégée muette et c'est tout ? Où doit-on aller ? Que dois-je faire précisement ? Et qu'est ce que j'aurai à y gagner ?

Tu sauras tout cela le temps venu. Quant à communiquer avec nous mentalement, c'est un pouvoir momentané. Thisbeth est en train d'apprendre ta langue par notre intermédiaire. Elle pourra bientôt s'exprimer par elle-même. A ce moment-là, nous disparaîtront de ta vue.

Bon, est-ce que j'ai le choix ? Pas vraiment, en effet lui répondirent les archanges. Alors où allons-nous ? Tu le verras, en attendant, nous te suggérons de profiter d'un moment ici. Nous sommes en 2015. Dans une université. Baladez-vous avec Thisbeth, nous vous avons rendues invisibles aux yeux de ces mortels. Profitez de cet instant vous qui venez du troisième millénaire. Quand Thisbeth aura fini son apprentissage de votre langue, nous vous ferons savoir comment rejoindre le lieu de votre quête. Et peu à peu, les anges cessèrent de scintiller, disparaissant de la vue d'une Amaelle plutôt perplexe et confuse.

Ok, ça a le mérite d'être clair pensa Amaelle. Et puis, je ne suis pas de taille contre ces deux-là. Allez, Thisbeth, dit-elle à la jeune femme, viens découvrir ce monde. Je pense que bien des surprises nous attendent. Et les deux jeunes femmes franchirent la porte.

 

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AUTEUR: Urusezel

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